En ce moment Enercoop vous parle d'Europe, car si la transition énergétique a besoin de se construire au niveau local, il est également indispensable de penser à sa construction au niveau européen. Découvrez ainsi une série inédite d'interviews de nos collaborateurs coopératifs au niveau européen. Aujourd'hui, direction l'Allemagne, pour rencontrer la coopérative DGRV, le Bureau national allemand des coopératives d‘énergie, avec Andreas Wieg.
Description de la coopérative
Le Bureau national des coopératives énergétiques de la Confédération Raiffeisen des coopératives allemandes (DGRV) représente les intérêts de 860 coopératives énergétiques et de leurs 183 000 membres. En tant que groupe de pression politique, nous sommes en lien étroit avec les décideurs politiques ainsi qu'avec les autorités publiques, les associations concernées et les médias en Allemagne. La mission principale du bureau national est de défendre les intérêts des coopératives énergétiques allemandes dans le débat politique sur la transition énergétique. La plupart des coopératives énergétiques exploitent des centrales électriques photovoltaïques ou des éoliennes, mais il existe également un groupe de 150 coopératives de chauffage urbain. Au total, toutes les coopératives membres de notre fédération ont investi 2,7 milliards d'euros dans les énergies renouvelables.
Bonjour Andreas, comment va votre coopérative ?
Nous avons récemment eu de bonnes nouvelles pour nos coopératives car notre gouvernement a annoncé il y a quelques semaines la suppression du plafond qui limitait les projets photovoltaïques. La plupart de nos coopératives d’énergie produisent de l'électricité à partir de panneaux solaires soit pour consommer directement cette électricité, soit afin d’alimenter le réseau de distribution. Cette mesure est donc clairement un signe de progrès pour nous. Cette évolution réglementaire fait suite à de longues discussions avec les décideurs politiques autour de ce plafond pour le photovoltaïque, mais aussi au sujet des règles de distance pour les projets éoliens (entre les habitations et les éoliennes). Ces deux points ont longtemps bloqué les investissements dans de nouvelles installations d’énergie renouvelable.
Cependant, un des gros problèmes pour les coopératives énergétiques et d’autres petites installations reste la nécessité de passer par des appels d’offres pour les projets photovoltaïques et éoliens. Depuis l'introduction de ce système d’appels d’offres, seules quelques coopératives ont pu faire approuver leurs projets et obtenir des soutiens publics. La plupart d’entre elles ne participent même pas à ce processus car le risque de perdre les coûts de développement par la suite est trop élevé. Le développement de nouvelles petites installations photovoltaïques (sans soutien public) a aussi diminué l'année dernière. Seulement 54 % de nos coopératives énergétiques sont disposées à investir dans ce type de projets - contre 71 % en 2018. Il est donc très important pour nous de trouver de nouvelles opportunités de développement.
Sur quels sujets travaillez-vous actuellement ?
Nous travaillons actuellement sur des propositions pour nourrir le débat politique sur la réglementation liée à l'énergie. Pas uniquement sur les thématiques telles que le photovoltaïque ou les appels d’offres, mais également sur la chaleur et d'autres questions. Nous nous attendons à la publication d’une nouvelle réglementation cette année et nous espérons pouvoir résoudre certains de ces problèmes à cette occasion.
Depuis le mois d’avril dernier, nous avons élargi nos activités à la mobilité électrique. Via un nouveau projet et avec l’appui d’un nouveau collègue, nous travaillons sur l'autopartage et des opportunités de développement similaires pour les coopératives énergétiques dans les zones rurales. Un autre de nos nouveaux sujets est la coopération internationale dans le domaine de l'énergie. Depuis plus de 40 ans, DGRV mène des activités d'aide au développement auprès de coopératives dans de nombreux pays à travers le monde. Nous avons intégré l'énergie comme une nouvelle thématique de collaboration internationale. Nous avons déjà publié quelques études et il existe un énorme potentiel pour des projets énergétiques coopératifs en Asie et en Amérique latine - en particulier dans les zones rurales et en partenariat avec des coopératives agricoles locales.
A Enercoop, nous travaillons actuellement sur la transposition des nouvelles définitions européennes des communautés énergétiques en droit français car nous espérons que cela contribuera à une transition énergétique plus citoyenne, nécessaire pour surmonter une partie des défis auxquels nos sociétés sont confrontées aujourd'hui.
Pensez-vous que les communautés énergétiques font partie de la solution pour avoir des sociétés plus résilientes dans un monde post-crise sanitaire ? Et si oui, pensez-vous que les récentes directives européennes pourraient vraiment accélérer leur développement dans votre pays ?
Bien sûr ! Je suis convaincu que les coopératives, et en particulier les coopératives d‘énergie renouvelable, contribuent à une société plus résiliente. D‘ailleurs c’est ma principale motivation pour exercer ce métier et c’est aussi ce qui motive la plupart des salariés et administrateurs des coopératives énergétiques. Les sociétaires réfléchissent beaucoup à leur consommation d'électricité et à leur comportement en général. Je crois que le fait d‘être propriétaire (en partie) d‘une installation d‘énergie renouvelable et l'interaction sociale qui a lieu au sein même des coopératives créent une plus grande acceptation sociale de la transition énergétique et encouragent un mode de vie durable. Je ne pense pas que cet effet social ait quelque chose à voir avec la crise sanitaire actuelle ou toute autre crise. Je pense toutefois que cela peut aider à surmonter certains des défis auxquels nous faisons face aujourd’hui.
Alors que le cadre juridique des coopératives d’énergie renouvelable en Allemagne offre peu de raisons de se réjouir, la situation au niveau européen a pris une tournure positive. En raison des directives européennes, le législateur allemand est également appelé à fixer des conditions-cadres appropriées pour les coopératives énergétiques et les autres acteurs citoyens de l'énergie. Parmi les autres allègements pour la production et la fourniture d'énergie, l'enjeu le plus intéressant pour nous est le « partage d'énergie » qui est - pour le dire en termes très simples - la production et la consommation collectives d'électricité. Il s'agit du modèle commercial parfait pour les coopératives énergétiques. Celles-ci peuvent gérer en commun la production des centrales électriques appartenant à leurs sociétaires ou à la coopérative directement et fournir cette énergie à ses membres. Nous espérons vraiment obtenir un cadre réglementaire approprié pour ce type de modèles. Compte tenu de la situation politique actuelle, malheureusement, j'ai quelques doutes.
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