Agriculture et énergie renouvelable, une synergie possible ?
L’approche du réseau Enercoop sur l’Agrivoltaïsme
C'est une question qui revient de plus en plus souvent lorsqu'on parle du développement de projets solaires photovoltaïques au sol. Si nous privilégions et recommandons l'utilisation de terres dites dégradées (c'est-à-dire non utilisables pour l'agriculture), il arrive que des projets de parcs se retrouvent sur des terres qui allieront, à terme, activités d'agriculture et de production d'électricité renouvelable. Détails sur notre positionnement.
En devenant producteur, le réseau Enercoop s’assure une indépendance à l’égard d’un marché de l’électricité instable en plus de maîtriser les coûts d’approvisionnement et la qualité environnementale et sociale des projets.
Les types de projets sont divers : petits parcs solaires au sol, éoliens, hydrauliques et… agricoles ! Et oui, l’énergie s’exprime de diverses façons au travers de l’agriculture et ce lien n’est pas nouveau. L’utilisation de la force de l’eau et de celle du vent ont marqué les premiers jalons du recours aux énergies dans l’agriculture. Aujourd’hui, ce lien s’exprime aussi à travers la production de biomasse, la méthanisation ou encore l’agrivoltaïsme.
Enercoop peut jouer un rôle dans l’association énergie renouvelable & agriculture. Mais attention pas n’importe comment !
Pour expliquer l’apparition de ces nouvelles associations, dont l’agrivoltaïsme, il faut passer par la compréhension des enjeux énergétiques et agricoles actuels.
Contextes d’émergence des filières ENR - Agriculture
Aujourd’hui, force est de constater que le système alimentaire et agricole français est en grande difficulté. En plus des impacts du changement climatique, le modèle suivi depuis les années 1960 (industrialisation et intensification de l’agriculture) arrive à ses limites et fait face à de nombreux enjeux, notamment :
- Économiques et sociaux (dépendances aux aides de la PAC, concurrence des prix des marchés extérieurs, revenus faibles, baisse du nombre d’exploitants, etc.) ;
- Fonciers (artificialisation des terres, pressions sur l’utilisation des terres agricoles pour des usages non-agricoles) ;
- Sanitaires et environnementaux (pesticides, engrais chimiques, érosion des sols, appauvrissement, perte de biodiversité, consommation des ressources) ;
- Et climatiques (gel, grêle, inondations, émissions de GES, impact sur les rendements agricoles, modification de la phénologie des plantes, etc.).
En parallèle des enjeux agricoles, le rapport du GIEC rappelle que les émissions de gaz à effet de serre dûes aux activités humaines ont réchauffé le climat à un rythme sans précédent ! Pour faire face à la crise actuelle, la France se dote d’objectifs ambitieux en matière de renouvelables : d’ici 2030, elle souhaite atteindre 33 % d’énergie renouvelable dans son mix énergétique (répartition des différentes sources d’énergie consommée), contre 20 % actuellement ! En matière de centrales photovoltaïques, il est prévu 11,6 GW de puissance installée fin 2023 et entre 20,6 et 25 GW au 31 décembre 2028. Ces objectifs demandent aux acteurs de la filière une mobilisation rapide afin d’assurer une transition énergétique plus que nécessaire.
L’agrivoltaïsme, une synergie possible ?
Pour accélérer et répondre aux enjeux évoqués ci-dessus, la France se dote d’une nouvelle politique énergétique nationale : est , la loi relative à l’accélération de la production des énergies renouvelables (APER), votée le 10 mars 2023, entre autres dispositions, a autorisé le développement d’installations photovoltaïques sur des terres agricoles. Une définition est (enfin) donnée à l’agrivoltaïsme. La loi prévoit également trois critères cumulatifs pour aider à qualifier les projets comme agrivoltaïques.
Cette filière est vue comme un moyen d’apporter des solutions à la transition de nos systèmes énergétiques et agricoles.
Et Enercoop là-dedans ?
Le réseau Enercoop est conscient que la lutte contre le réchauffement climatique et la transition énergétique appellent à renforcer le développement des énergies renouvelables et à soutenir l'agroécologie afin de repenser les systèmes de productions agricoles et de préserver nos ressources naturelles.
L’agrivoltaïsme est “apparu” chez Enercoop via des sollicitations provenant de sociétaires, de partenaires publics et privés ou d’agriculteurs quant au développement de projets photovoltaïques sur leurs terres agricoles. Au sein du réseau, ces demandes ont entraîné de nombreux questionnements : faut-il se lancer ? comment ? et avec qui ?
A ce jour, l’agrivoltaïsme, chez Enercoop, n’est pas vu comme un axe de développement principal de l’activité de production. Il sera étudié au cas par cas et, si et seulement si, les projets répondent majoritairement à des critères bien spécifiques car, si on se lance, ce n’est pas n’importe comment, et on s'outille !
S’informer, le premier pas
Les détracteurs de l’agrivoltaïsme alertent sur :
- L’accaparement des terres agricoles par des propriétaires fonciers et/ou des entreprises privées ;
- Le délaissement des activités agricoles pour la « culture du soleil » ;
- La spéculation foncière avec le versement de loyers démesurés ;
- …
D’autres acteurs mettent en avant les effets positifs de telles installations :
- Les panneaux apportent protection aux cultures, dans un contexte de dérèglement climatique toujours plus intense (sécheresse, grêle, gel tardif…) ;
- Les revenus du parc donnent accès à des infrastructures financièrement inaccessibles (clôtures, abreuvoirs, filets paragrêle…) et viennent compléter les salaires souvent peu rémunérateurs des exploitants agricoles ;
- Ce peut être un outil de transition “agro énergétique”, en encourageant des pratiques vertueuses (agroécologie, valorisation de circuits courts) ;
S’outiller, le second.
Fort de ces points de vue, le réseau s’est outillé pour aider à la construction d’une vision commune sur le sujet et voir quelle place occuper au sein de cette filière :
- Embauche d’une personne 100 % dédiée aux sujets agricoles et agrivoltaïques ;
- Mise en place d’un “groupe de travail agrivoltaïsme” afin de créer des documents de cadrage définissant nos critères, nos limites et décrivant le “projet agrivoltaïque idéal” ;
- Discussions avec les opposants, les spécialistes et les acteurs du monde agricole ;
- Se servir de l’intelligence collective du réseau et s’appuyer sur notre ADN et nos valeurs. ;
Avec ces outils, Enercoop construit son approche. Nous n’imaginons pas développer des dizaines de projets agrivoltaïques, nous voyons seulement des projets citoyens et locaux, et dont la pertinence est réellement avérée (protection des cultures et amélioration des conditions agronomiques des parcelles, apport économique complémentaire au revenu agricole restant principal, retombées économiques, sociales et environnementales pour le territoire, aide à la transition vers des systèmes de cultures plus durables, agroécologiques…).
Les prochaines étapes
Les groupes de travail se tiendront tous les mois afin de travailler sur la vision partagée d’Enercoop et les documents de cadrage. Ils seront revus et partagés, en temps voulu.
En attendant, des lettres informatives, des articles et des webinaires pourront être organisés régulièrement pour tenir le réseau de salariés et de sociétaires informés des avancées dans cette filière !