Quand on parle d’énergies renouvelables (EnR), un certain nombre d’idées reçues ont (toujours) la peau dure. Cet été, Enercoop vous propose de vous pencher sur ces idées reçues et de les démystifier - ou les débunker ! Aujourd’hui, regardons 2 nouvelles idées reçues reviennent régulièrement : 1/ Sans les terres rares, pas d’éolien ou de photovoltaïque, 2/ Les éoliennes et les panneaux solaires ne sont pas et ne seront jamais produits en France.
1/ Sans les terres rares, pas d’éolien ou de photovoltaïque
“Il y a énormément de terres rares dans les éoliennes et les panneaux photovoltaïques”
Avant de nous lancer dans cette idée reçue, petit point sémantique. Les matériaux dit “critiques” sont des matières premières qui revêtent une importance stratégique, du fait de leur rareté, de leur concentration dans un seul pays ou région, ou de la vulnérabilité de l’économie à une pénurie.
Au sein de ces matériaux critiques, un groupe de 17 métaux est appelé couramment “terres rares”. Ils sont essentiels à certains composants industriels, mais leur extraction peut entraîner des conséquences néfastes sur l’environnement, et leur production est située à 97 % en Chine. Un seul d’entre eux, le néodyme, est utilisé marginalement dans les éoliennes.
Matériaux critiques, terres rares et EnR
- Penchons-nous d’abord sur l’éolien : il y a effectivement des aimants très gourmands en néodyme (une terre rare) dans certains modèles d'éoliennes (aimants permanents, principalement pour les éoliennes off shore). Mais ces modèles sont très minoritaires : en France, plus de 90 % des éoliennes ne contiennent aucune terre rare. De plus, seulement 2 % du néodyme extrait est utilisé pour l’éolien : il est bien plus présent dans les petits moteurs ou l’électronique.
- Ensuite le photovoltaïque : les technologies solaires photovoltaïques actuellement commercialisées n'utilisent pas du tout de terres rares. Seule une frange minime (10 %) des technologies solaires, appelées couches minces, utilisent des matériaux critiques (l'indium par exemple). La plupart des cellules actuellement utilisées sont faites en silicium, un matériau très abondant sur Terre.
Du côté des matériaux non critiques : les éoliennes et les panneaux solaires sont très gourmands en matériaux non critiques, comme l’acier et le cuivre, dont l’extraction et la transformation restent polluantes. (cf notre article sur le recyclage des EnR). Il est donc indispensable de coupler le développement des EnR d’un très gros effort de sobriété, pour n’installer que les capacités de production dont nous avons réellement besoin.
Comme les autres industries, celle des EnR consomme des matériaux, et certains matériaux critiques, même si c’est en minorité. Le recyclage, déjà efficace, peut encore être amélioré. Et surtout, aucune transition énergétique n’est possible sans un effort de sobriété avant toute chose, car l’énergie la plus propre est celle qu’on ne consomme et qu’on ne produit pas.
2/ Les éoliennes et les panneaux solaires ne sont pas et ne seront jamais produits en France
“Les équipements nécessaires à la production d’EnR sont produits en Asie : cela engendre des émissions de CO2 et c’est mauvais pour les filières industrielles françaises”. C’est le jeu de la géopolitique : les moyens de production ne sont situés ni en France ni en Europe, nous sommes donc dépendant des pays qui en produisent. C’est une tendance qui est en train de s’inverser, lentement mais sûrement.
Eoliennes
Il est vrai que les plus grands fabricants d’éoliennes ne sont pas français : il y a des firmes chinoises sur le marché, mais aussi beaucoup d’entreprises européennes (les allemands Enercon et Nordex, les danois Vestas et Orsted). Pour autant, de nombreux métiers sont liés à l’éolien en France : l’assemblage, l’installation, le raccordement des parcs, l’exploitation ou le démantèlement représentent 18 000 emplois dans 1 000 entreprises. Dans certains secteurs, la France est même en pointe : c’est le cas des éoliennes flottantes, fabriquées par des PME pionnières.
Panneaux solaires
Il existe 5 entreprises de fabrication ou d’assemblage de panneaux solaires en France (DualSun, Systovi, Voltec, Recom-Sillia et Photowatt, filiale d’EDF). Comme l’éolien, la filière entière crée des emplois, plus de 8 000 en 2018. La production européenne se développe également.
Les panneaux solaires asiatiques ne sont pas une fatalité : par exemple, Energie Partagée et Sereny Sun ont développé un projet de production d’électricité photovoltaïque à Cabrière-Calas, et la toiture d’une école est couverte de 1 200m2 de panneaux solaires français et italiens.
Certes, une minorité d’éoliennes et de panneaux solaires sont aujourd’hui fabriqués en Europe, mais ce n’est pas une fatalité : des filières industrielles françaises innovantes existent, et doivent être encouragées.