Les offres d'électricité verte et l'ARENH
Savoir déméler le vrai du faux avec Enercoop
Parmi la myriade d'offres qualifiées comme vertes présentes sur le marché de l'électricité, certaines proposent réellement une offre 100 % renouvelable, mais d'autres cachent la provenance de leur électricité grâce aux garanties d'origine. Le concept de l'ARENH, l'Accès Régulé à l'Electricité Nucléaire Historique, permet de proposer une offre verte alimentée par du nucléaire. Savez-vous démêler le vrai du faux ? Faites le point avec Enercoop en vidéo.
Les offres d’électricité verte se multiplient, mais elles ne sont pas toutes aussi vertes qu’elles le prétendent. En effet, la grande majorité des fournisseurs d’électricité verte achètent de l’électricité nucléaire à bas prix (plus bas que le prix du marché) et la transforment avec un coup de peinture en électricité verte. Ce coup de peinture, ce sont les garanties d'origine, qui sont achetées et placées sur l'électricité nucléaire, pour en dissimuler la nature et faire croire à une offre verte.
Contraire à l’intention même des offres vertes, cette pratique, aujourd’hui dissimulée, doit être portée à la connaissance des consommateurs.
Comment détecter les fausses offres vertes d’électricité bon marché ?
Pour comprendre comment reconnaître une offre vraiment verte d'une offre d'origine nucléaire, il convient de connaître un dispositif : celui des garanties d’origine.
Les offres d’électricité dites “vertes” se multiplient : quasiment tous les fournisseurs d’électricité en proposent une, et certains en font leur spécialité. Les offres vertes des fournisseurs garantissent logiquement au client final une alimentation en électricité provenant uniquement de sources d’énergies renouvelables (énergie hydraulique, éolienne, solaire, géothermique, biomasse ou même marine).
Comme l’indique le Médiateur national de l’énergie sur son site : « une offre de fourniture d’électricité est dite verte si le fournisseur peut prouver qu’il a produit ou acheté de l’électricité d’origine renouvelable en quantité équivalente à la consommation des clients ayant souscrit à cette offre. Pour prouver l’origine de l’électricité produite à partir de sources renouvelables, seules les garanties d’origine (GO) ont valeur de certification ».
L’émission, le transfert et l’utilisation d’une GO se fait un travers d’un registre national, dont la gestion a été accordée à Powernext depuis 2013. Toutefois, elles peuvent être transférées entre pays par la correspondance entre ces registres. Celles-ci peuvent être vendues et achetées conjointement ou indépendamment de l’électricité achetée par le fournisseur, car il est physiquement impossible de tracer l’électricité verte dans un réseau où tout se mélange.
Le consommateur, en optant pour une offre verte, manifeste son intention de choisir et de soutenir le développement des énergies renouvelables et la transition énergétique. Mais en réalité, ce n’est pas toujours le cas. D’abord, il faut rappeler que de plus en plus d’acteurs (ADEME, Médiateur national de l’énergie, parlementaires) distinguent deux types d’offres vertes :
- d’une part, ils distinguent les offres des fournisseurs qui achètent l’électricité sur un marché d'un côté et les garanties d'origine de l'autre auprès d’autres acteurs différents,
- et d’autre part les offres des fournisseurs qui achètent aux mêmes producteurs de l'électricité de sources renouvelables l’électricité et les garanties d'origine.
Enercoop s'inscrit dans cette dernière démarche avec un objectif clair : alimenter le circuit-court de l'énergie et valoriser une production locale, à taille humaine, d'une énergie citoyenne. Mais au-delà de cette première distinction tout à fait essentielle, se cachent parfois des pratiques des plus discutables et peu transparentes.
On peut s’approvisionner en électricité nucléaire et proposer une offre verte !
L’électricité qui alimente les offres vertes peut, par exemple, provenir de producteurs d’électricité de sources renouvelables avec lesquels les fournisseurs ont des contrats directs d’approvisionnement, mais également de centrales nucléaires au travers du dispositif de l’Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique (ARENH).
Mis en place en 2010, le mécanisme de l’ARENH avait pour objectifs annoncés de faire profiter aux consommateurs et aux fournisseurs alternatifs concurrents d’EDF du bénéfice de la rente nucléaire, de permettre à la concurrence de s’exercer et d’assurer le financement et les investissements dans le parc de production français. Il est ainsi possible d’acheter de l’électricité à l’ARENH et des GO ailleurs sur le marché européen pour proposer une offre verte. Et le tout à des prix défiant toute concurrence !
Aussi, la quasi-totalité des fournisseurs alternatifs ont signé un accord-cadre avec EDF pour avoir droit à cet approvisionnement et fait un arbitrage économique en fonction de l’anticipation des prix de marché et du prix établi de l’ARENH (42 €/MWh) pour que son coût d’achat d’énergie soit le plus bas possible. Comme l’indique la Commission de régulation de l’énergie, seuls quelques fournisseurs d’électricité verte n’ont pas signé l’accord-cadre pour bénéficier de l’ARENH, notamment Enercoop et Ilek.
Et quel est le problème ?
Pour plusieurs raisons, la superposition des garanties d’origine à de l’électricité achetée au tarif de l’ARENH est une supercherie à dénoncer.
● C’est un manque de transparence criant vis-à-vis des consommateurs
Cela s’apparente une duperie à l’égard des consommateurs d’énergie qui comptent sur leur geste responsable de consommation d’électricité verte pour soutenir, à leur niveau, le développement des énergies renouvelables et la transition énergétique. Or, les consommateurs n’ont pas accès à ces informations sur les factures d’électricité. Lorsqu’ils optent pour une offre verte, la réglementation n’exige pas de fournir un document joint détaillant la proposition d'offre verte (la mention du recours à l’ARENH n’est aucunement requise).
Pour proposer une offre verte au sens légal, il suffit d’acheter un volume de garanties d’origine équivalent à l’électricité servant à alimenter les clients finaux, ces certificats pouvant provenir de France ou d’ailleurs en Europe, même en Islande et en Norvège.
● Cela ouvre la porte à des offres d’électricité verte low cost, dont les prix défient la concurrence
Le prix modique d’une garantie d’origine française ou européenne ne dépasse généralement pas 1 €/MWh. La possibilité pour les fournisseurs d’électricité verte de recourir à l’ARENH explique encore davantage l’abondance des offres vertes sur le marché, le recours quasi-systématique à l’électricité verte par les nouveaux entrants, et les prix souvent imbattables que gros et petits fournisseurs proposent pour de l’électricité verte. Les fournisseurs profitent de cet angle mort pour verdir des offres à moindre coût : le tout ne concourant pas à renforcer le soutien pourtant vital aux énergies renouvelables.
Par ailleurs, le coût réel du nucléaire n'est pas reflété dans les prix de l'ARENH. Le tarif n’a pas évolué depuis janvier 2012, alors que les obligations pesant sur EDF n’ont cessé d’augmenter... En effet, ni le niveau actuel et ni les modalités d’accès ne sont représentatifs des charges pesant sur EDF et du coût actuel de production du nucléaire en France, et encore moins des investissements à venir : grand carénage, démantèlement, gestion des déchets, nouveaux réacteur.
● Cela réduit la rémunération des producteurs d’énergie renouvelable
Le principe des garanties d’origine pour les énergies renouvelables est de permettre au producteur de vendre la valeur de l’électricité sur le marché, et la valeur verte, représentée par les GO, sur un marché distinct. L’introduction de l’ARENH corrompt ce principe : la demande en électricité des fournisseurs se voyant partiellement ou complètement satisfaite via l’ARENH, la demande sur le marché est automatiquement réduite ce qui a pour conséquence de faire baisser le prix (résultat d’un équilibre offre-demande) et donc in fine la rémunération des producteurs d’électricité de sources renouvelables, à qui l’on demande de plus en plus de vendre sur le marché. L’ARENH vient donc contrarier le mécanisme des GO qui est construit pour apporter une sur-rémunération aux producteurs EnR pour la “valeur verte”. Une offre ARENH + GO est aujourd’hui beaucoup moins rémunératrice pour les producteurs EnR qu’une offre de marché pure (sans ARENH ni GO) !
Y a-t-il des solutions ?
=> Pour remettre de la cohérence dans le marché de détail de l’électricité : interdire le recours de l’ARENH aux fournisseurs pour alimenter des clients en électricité verte certifiée par des garanties d’origine, en cohérence avec la demande du Conseil supérieur de l’énergie.
=> Pour permettre aux consommateurs de faire un choix éclairé : obliger les fournisseurs à faire figurer dans leur documents de communication les sources d’approvisionnement en électricité : ARENH, marché, installations en propre, contrats directs.