Publié le lundi 2 décembre 2024

La production d’électricité
en France

Parc de production d'électricité solaire sous un ciel bleu. Photo prise depuis un bosquet d'abre aux alentours puisque des feuilles et branches encadrent la photo.

Brancher un appareil électrique dans une prise est un geste devenu classique dans nos quotidiens. Mais derrière ce geste anodin se cache toute une filière organisée et un ensemble d’acteurs travaillant sur la production, le transport et la distribution, ou encore la fourniture d’électricité. Dans cet article, nous nous intéressons plus particulièrement au premier bout de la chaîne, celui de la production d’électricité en France.

Électricité et mix électrique, quésako ?

Il existe des formes d’énergie disponibles spontanément dans notre environnement, comme les énergies fossiles, le soleil ou le vent par exemple. Dans ce cas, on parle d’énergies primaires. L’électricité n’est pas naturellement disponible dans notre environnement, elle provient de la transformation d’une énergie primaire. Il s‘agit donc d’un vecteur énergétique, sorte de véhicule capable d’acheminer de l’énergie d’un lieu de production à un lieu de consommation. En 2022, en France, l’électricité représentait 27 % de l’énergie finale consommée. 

L’ensemble des énergies primaires utilisées pour produire de l’électricité dans un pays, et leurs proportions respectives, forme le mix électrique de ce pays. On se propose de passer en revue les différents moyens de production composant le mix électrique français.

Comment produit-on de l’électricité en France aujourd’hui ?

En 2023, 65 % de la production d’électricité française était issue de la filière nucléaire, tandis que près de 27 % du mix provenait des énergies renouvelables. Les 8 % restants proviennent majoritairement de centrales thermiques, dont des centrales exploitant des énergies fossiles.

Bilan électrique RTE 2023

                     RTE, bilan électrique 2023

Décryptons maintenant comment fonctionnent ces moyens de production d’électricité.

Le nucléaire

Les centrales nucléaires françaises exploitent la même technologie, celle des réacteurs à eau pressurisée. Pour pouvoir faire fonctionner un réacteur nucléaire, il faut d’abord préparer le combustible fissile : l’uranium. Celui-ci doit être extrait, concentré, raffiné et enrichi afin d‘augmenter sa teneur en uranium 235, seul type d’uranium qui peut être fissuré. La production d’électricité repose sur la récupération de la chaleur issue de la fission d’atomes d’uranium. Au sein du réacteur, cette fission produit de la chaleur, qui transforme de l’eau en vapeur. Cette vapeur met en mouvement une turbine couplée à un alternateur, qui produit de l’électricité.

La production d’électricité nucléaire émet peu de CO2  (3,8g de CO2eq/kWh d’après EDF et l’ADEME), mais elle génère des matières et des déchets radioactifs et pose des questions de sûreté et de sécurité et d’impacts sanitaires et environnementaux.

En 2023, la filière nucléaire a participé à hauteur de 65 % à la production d’électricité française.

L’hydroélectricité

Pour produire de l’électricité, la filière hydroélectrique exploite la force de l’eau pour faire tourner des turbines reliées à des alternateurs. On distingue trois types de sites de production :

  • Les centrales “au fil de l’eau”, qui sont installées sur un cours d’eau sans contraindre son écoulement. Dans cette catégorie, on retrouve par exemple les anciens moulins reconvertis en centrales hydroélectriques. Au vu de la configuration de ces centrales, la production d’électricité dépend du débit du cours d’eau.
  • Les installations de lacs ou d’éclusées, qui exploitent un dénivelé entre un barrage situé en amont de l’installation, et la suite du cours d’eau, en aval. Ces installations s’appuient donc sur l’existence d’une retenue d’eau et la possibilité d’ouvrir des vannes ou d’envoyer de l’eau dans des conduites forcées pour faire tourner des turbines. Les centrales de lac exploitent un plus grand dénivelé que les centrales d’éclusées.
  • Les Stations de Transfert d’Energie par Pompage (STEP) sont composées de deux bassins interconnectés. Lorsqu’il y a besoin de produire de l’électricité pour le réseau, l’eau du bassin supérieur est relâchée afin qu’elle entraîne les turbines : on appelle cela le turbinage. L’installation peut également effectuer l’opération inverse, en remontant de l’eau du bassin inférieur au bassin supérieur : on appelle cela le pompage, et il a lieu pendant les périodes de moindre demande d’électricité. Il existe 6 STEP en France, et elles peuvent être actionnées très rapidement pour équilibrer le réseau électrique.

On parle de petite hydroélectricité pour des installations ayant une puissance inférieure à 10 MW et de grande hydroélectricité au-delà. En 2023, l’hydroélectricité a représenté 12 % de la production électrique française.

L’éolien

Les éoliennes sont des dispositifs capables de transformer la force du vent en électricité. Elles sont composées de fondations, d’un mât, d’une nacelle comportant un alternateur et d’un rotor composé de trois pales. Le rotor est fixé sur la nacelle, qui peut pivoter sur le mas pour tourner l’éolienne face au vent. Le principe de fonctionnement est simple : le vent entraîne le rotor qui est fixé sur un axe qui fait tourner un alternateur, ce qui produit de l’électricité.

Au sein de la filière éolienne, on distingue l’éolien terrestre de l’éolien en mer. En France, les éoliennes terrestres ont souvent une puissance comprise entre 2 et 4,5 MW. Elles ont une taille comprise entre 100 et 200 mètres de haut. Les éoliennes tournent en moyenne entre 75 % et 95 % du temps. Les éoliennes en mer ont une puissance supérieure, souvent comprise entre 6 et 8 GW pour les éoliennes installées actuellement.

En 2023, l'éolien a représenté 10 % de la production électrique française.

Les centrales à gaz

Il existe plusieurs types de centrales à gaz produisant de l’électricité. Les centrales à flamme sont les plus anciennes et les plus répandues. Dans celles-ci, le gaz est brûlé pour chauffer de l’eau. L’eau chauffée se transforme en vapeur et fait tourner une turbine entraînant un alternateur. Ensuite, la vapeur est condensée, elle retrouve son état initial en redevenant de l’eau froide et peut servir pour un nouveau cycle. 

Un autre type de centrales plus performantes coexiste : les centrales à cycle combiné gaz. Celles-ci sont composées de deux turbines. Dans la turbine à combustion, de l’air sous pression est injecté. Le contact de l’air comprimé et du gaz crée une flamme et des gaz d’échappement qui font tourner la turbine. En parallèle, on profite de la chaleur libérée par la combustion pour transformer de l’eau en vapeur et alimenter une turbine à vapeur, comme dans les centrales à flamme.

Les centrales à gaz émettent des quantités importantes de CO2, car leur fonctionnement dépend de la combustion d’une énergie fossile. Par ailleurs, la France n’étant pas productrice de gaz fossile, elle dépend des importations, qui peuvent varier selon les contextes géopolitiques, comme cela a été mis en évidence pendant la crise énergétique de 2022.

En 2023, les centrales à gaz ont représenté 6 % de la production électrique française.

Le solaire photovoltaïque

Le solaire photovoltaïque exploite l’énergie lumineuse émise par le soleil pour produire de l’électricité. Un panneau photovoltaïque est composé de plusieurs cellules photovoltaïques. Au sein d’une cellule, on retrouve différentes couches d’un matériau semi-conducteur, du silicium le plus souvent. Celui-ci a la capacité de transformer les photons qui composent l’énergie lumineuse, en électricité. Le courant généré étant un courant continu, il faut également équiper l’installation d’un onduleur, qui transforme le courant continu en courant alternatif, injectable dans le réseau électrique.

Il existe plusieurs types de panneaux photovoltaïques :

  • Les panneaux solaires polycristallins composés d’un assemblage de plusieurs cristaux de silicium et qui sont les plus couramment utilisés ;
  • Les panneaux solaires monocristallins, dont les cellules sont composées d’un unique bloc de silicium. Ils présentent un meilleur rendement mais sont plus onéreux que les panneaux solaires polycristallins ;
  • Les panneaux solaires à couches minces, plus fins et légers. Comme ils présentent un rendement inférieur aux panneaux cristallins, ils ont une position minoritaire sur le marché.

Il est possible d’installer des panneaux solaires sur des toitures, au sol, sur des ombrières, ou encore en cohabitation sur des espaces agricoles : on parle alors d’agrivoltaïsme.

En 2023, le solaire photovoltaïque a participé à hauteur de 4 % à la production électrique française.

Les centrales thermiques à fioul ou au charbon

Les centrales au fioul et au charbon ont des fonctionnements similaires aux centrales à gaz classiques : on injecte du charbon broyé en fines particules ou de fioul liquéfié dans un brûleur afin de transformer de l’eau en vapeur, dans le but de faire tourner une turbine. Comme ces centrales brûlent des énergies fossiles, elles émettent des quantités importantes de CO2. Par ailleurs, elles participent à la pollution de l’air en dégageant des particules fines et d’autres types de polluants atmosphériques.

En France, deux centrales à charbon sont encore en fonctionnement : à Cordemais, en Loire-Atlantique et à Saint-Avold, en Moselle. On dénombre un peu plus de centrales à fioul en activité. En 2023, les centrales au fioul et au charbon représentaient 0,6 % de la production d’électricité française.

Thermique renouvelable et déchets

Au sein de la filière thermique renouvelable, on retrouve des installations qui produisent de l’électricité en utilisant comme combustible de la biomasse (bois, paille, etc.) ou du biogaz. Globalement, ces centrales fonctionnent comme d’autres centrales thermiques, en brûlant le combustible pour transformer de l’eau en vapeur et faire tourner un alternateur. Par ailleurs, les déchets ménagers et de papeterie peuvent également être utilisés pour produire de l’électricité, ou de l’électricité et de la chaleur dans des centrales de cogénération.

En 2023, 2 % de l’électricité produite en France provenait de centrales thermiques renouvelables et de l’incinération de déchets.

Equilibrer production et consommation d’électricité en France : le rôle des interconnexions internationales

L'adéquation entre la production et la consommation d'un pays se fait en partie grâce à des échanges d’électricité entre pays. La France fait partie du marché européen de l’électricité, ce qui implique qu’elle participe à des échanges internationaux d’électricité entre les pays membres. Techniquement, ces échanges sont rendus possibles par les interconnexions qui lient les réseaux électriques des différents pays. Dans l’Union Européenne, on dénombre 400 interconnexions et c’est environ 350 000 km de lignes électriques qui fonctionnent sur la même fréquence. La France est interconnectée avec six autres pays (Allemagne, Belgique, Suisse, Italie, Espagne et Grande-Bretagne).

Quels enjeux pour la production d’électricité en France dans les prochaines années ?

Une trajectoire de sobriété et d’efficacité où les usages sont électrifiés

Pour atténuer le dérèglement climatique, différents scénarios prospectifs établissent deux grandes directions pour atteindre la neutralité carbone en 2050  :

  • La réduction des consommations énergétiques ;
  • L’augmentation de la part de l’électricité dans le mix énergétique grâce au développement des énergies renouvelables

Chez Enercoop, nous nous inscrivons dans une vision de la transition énergétique telle que décrite par le scénario élaboré par négaWatt, qui décrit un chemin possible pour atteindre la neutralité carbone en 2050.

Dans le scénario négawatt, on distingue trois grands piliers :

  • La sobriété, ou la priorisation des besoins essentiels dans les usages individuels et collectifs de l’énergie ;
  • L’efficacité, c’est-à-dire la diminution de la quantité d’énergie nécessaire à la satisfaction d’un même besoin ;
  • Le choix des énergies renouvelables, et une sortie des énergies fossiles et fissiles.

C’est bien une baisse de la consommation énergétique permise conjointement par la sobriété et l’efficacité et un développement massif de toutes les énergies renouvelables qui permet d’avoir un mix énergétique quasi exclusivement renouvelable à l’horizon 2050.

Dans ce scénario, ce qui change, c’est à la fois le volume d’énergie produit et consommé, mais aussi la composition des mix énergétiques et électriques.

Quel mix électrique futur ?

Dans tous les scénarios prospectifs visant à atteindre la neutralité carbone, la part d’énergies renouvelables dans la production augmente. La présence de production nucléaire à l’horizon 2050 est sujette à débat. Le fait est que le parc actuel de réacteurs nucléaires est vieillissant et que ces centrales sont amenées à être démantelées prochainement. Les débats portent donc sur le choix de relancer la construction de nouvelles centrales nucléaires. Les deux rapports de RTE et négaWatt de 2022 ainsi que les scénarios de l’Ademe de 2013 et 2021 ont démontré qu'il était possible de produire suffisamment d'énergie et en particulier d'électricité pour satisfaire nos besoins énergétiques à l’horizon 2050, sans construire de nouveaux réacteurs nucléaires, à condition de réduire nos consommations d’énergie et de relever les défis engendrés par un mix électrique 100 % renouvelable. Le choix du mix énergétique de demain est un enjeu essentiel qui nécessite un débat démocratique associant l’ensemble des citoyen⋅nes.

Dans le scénario proposé par négawatt, l’électricité devient le vecteur d’énergie finale prépondérant. Elle couvre 44 % de la consommation finale en 2050, contre 23 % aujourd’hui. Cela signifie que, globalement, on utilise l’électricité comme source d’énergie pour plus d’actions qu’aujourd’hui : on parle d’une nécessaire électrification des usages.

Si l’on regarde le mix électrique plus précisément, on retient deux premiers éléments : en 2050, on ne produit plus d’électricité à partir d’énergies fossiles et d’ici 2045, les centrales nucléaires sont arrêtées. La composition du mix électrique fait donc la part belle aux énergies renouvelables.

On note notamment une progression importante de la filière éolienne, en mer et sur terre. En 2050, dans ce scénario, l’énergie du vent est la première source de production d’électricité. Le nombre d'éoliennes terrestres passerait de 8 660 en 2020 à 18 600 en 2050 (à titre de comparaison 30 000 éoliennes terrestres sont déjà installées en Allemagne). En parallèle, le scénario prévoit une multiplication par 13 du nombre d’installations photovoltaïques entre 2022 et 2050. Ces installations sont de différents types : parcs au sol, ombrières de parking, grandes toitures plates, hangars agricoles, autres toitures et petits systèmes diffus.

Les particularités des Zones Non Interconnectées

Les Zones Non Interconnectées (ZNI) sont des territoires qui ne sont pas physiquement connectés au réseau d’électricité continental, ou qui y sont connectés de façon limitée, comme la Corse. Les principales ZNI françaises sont la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion, Mayotte et la Corse. Ces territoires assurent encore l’essentiel de leur fourniture électrique avec des énergies fossiles importées, qui sont selon les territoires complétées par des énergies renouvelables locales ou importées.
Cette situation a deux conséquences.

  • D’une part, ces territoires sont dépendants des importations d’énergies fossiles, et donc exposés à la volatilité de leur prix et à un coût de production de l’électricité bien plus important qu’en Hexagone. Ce coût élevé n’est pas reporté sur les factures des particuliers, au nom de la péréquation tarifaire, mais pris en charge par le budget de l’Etat. 
  • D’autre part, leur mix électrique est fortement carboné.

La loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015 a fixé l’objectif ambitieux de l’autonomie énergétique de ces territoires d’ici à 2030, et à 2050 pour la Corse, ce qui est plus ambitieux que l‘objectif fixé pour l’Hexagone. Parvenir à l’autonomie énergétique en passant par des énergies renouvelables permettrait à la fois de diminuer drastiquement l'intensité carbone de l’électricité, et d’en baisser les coûts de production1. Il s’agit cependant d’un défi de taille :

  • Les ZNI sont majoritairement des territoires de petite taille, ce qui limite le recours au foisonnement, que l’on définit comme une dispersion spatiale des sites de production éoliens ou solaires, visant à réduire les fluctuations de production. Concrètement, il s’agit de diminuer les risques de manque de production sur une zone géographique, en la compensant par la production sur une autre zone géographique.
  • Certains de ces territoires sont insulaires et n’ont pas de perspective de raccordement à d’autres réseaux électriques. Or les interconnexions peuvent participer à l’équilibrage de l’offre et de la demande sur le réseau électrique, et jouer le rôle de filet de sécurité en cas de situation exceptionnelle.

Pour faire face à ces enjeux, le déploiement des énergies renouvelables sur ces territoires doit être accompagné du développement de moyens de stockage et de solutions de maîtrise de l’énergie.


1 Voir le rapport de l'ADEME à ce sujet p.6 et pp. 21-23

Sources :

https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/chiffres-cles-de-lenergie-edition-2023

https://analysesetdonnees.rte-france.com/bilan-electrique-2023/synthese

https://www.iea.org/countries/france

https://librairie.ademe.fr/energies-renouvelables-reseaux-et-stockage/6363-energies-renouvelables-reussir-la-transition-energetique-de-mon-territoire.html 

https://negawatt.org/IMG/pdf/synthese-scenario-negawatt-2022.pdf et https://www.negawatt.org/IMG/pdf/scenario-negawatt-2022-rapport-complet-partie4.pdf

https://librairie.ademe.fr/energies-renouvelables-reseaux-et-stockage/4173-vers-l-autonomie-energetique-des-zones-non-interconnectees-zni.html

Retrouvez toutesles actualités Enercoop