Ce que le programme du RN
fait à la transition énergétique
La combustion des énergies fossiles représente à elle seule 80 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Transformer nos usages et notre système énergétique pour les rendre moins émetteurs est une nécessité pour préserver le climat, améliorer la qualité de l’air, préserver les ressources naturelles et sécuriser notre approvisionnement. Toute l’action d’Enercoop depuis sa création s’inscrit dans cette logique de transition énergétique, pour transformer durablement la production d’électricité avec des projets renouvelables, locaux et citoyens et améliorer la maîtrise de nos usages, dans la logique du scénario esquissé par négaWatt et son triptyque sobriété, efficacité et renouvelables.
L’arrivée de l’extrême droite au pouvoir représente une menace sérieuse sur ce projet de transition énergétique, qui conduit notre coopérative à se mobiliser pour appeler à faire barrage au Rassemblement National dont le programme est délétère pour le climat, la planète et notre futur commun.
Zoom sur les principales menaces que le programme du RN fait peser sur la transition énergétique.
Un coup d’arrêt aux énergies éoliennes et solaires qui va nous coûter cher
Le RN se positionne historiquement contre le renouvelable. Marine Le Pen s’était positionnée en faveur d’un moratoire sur le solaire et l’éolien lors de la campagne pour l’élection présidentielle 2022. Le programme de Jordan Bardella aux Européennes prônait un moratoire sur les « énergies intermittentes » mais ne mentionnait explicitement que l’éolien. Un vide rapidement comblé par le député RN J.-P. Tanguy, interrogé sur ce point par Terra Nova. Le RN renoncera à un moratoire sur le solaire si la filière française / européenne est solide et si on avance suffisamment sur le stockage… Aucune de ces conditions n’est en voie d’être remplie à brève échéance sans une politique de soutien volontariste, c’est le serpent qui se mord la queue.
Le RN veut un mix énergétique reposant donc essentiellement sur le nucléaire. Au-delà des dangers en matière de sûreté, de sécurité, de gestion des déchets, de dépossession des citoyens de leur avenir énergétique que cette politique implique, il est important de rappeler que le moratoire sur les ENR prive également le pays d’un pilier incontournable pour la maîtrise des coûts de l’énergie dans les années à venir. Un comble pour un parti qui fait du pouvoir d’achat des Français un sujet central de son programme.
A l’inverse, en inscrivant la politique énergétique de la France dans le triptyque sobriété / efficacité énergétique / énergies renouvelables, les conditions sont réunies pour baisser la facture des Français. Les bénéfices peuvent être attendus à trois niveaux : les politiques de sobriété et d’efficacité énergétiques (passant notamment par des politiques de rénovations complètes et performantes des logements) baissent la consommation d’énergie (à la fois des personnes et des entreprises) ; la fin des importations d’énergies fossiles réduit drastiquement la facture énergétique du pays (pour rappel celle-ci s’élevait en 2019 à 45 milliards d’euros) ; un mix largement voire complètement composé d’énergies renouvelables est basé sur des technologies donc les coûts sont à la baisse (les ENR sont de plus en plus compétitives), prévisibles et dont le caractère décentralisé et local permet la mise en place d’un plus juste partage territorial de la valeur.
Une dépendance aux énergies fossiles qui va encore s’accroître, au mépris de l’environnement et de la souveraineté énergétique française :
Le scénario du RN repose sur la relance du nucléaire et la mise à l’arrêt des énergies éoliennes et photovoltaïque. Mais en attendant que les nouvelles capacités nucléaires soient en mesure de délivrer leurs électrons - autour de 2035 dans le scénario optimiste - c’est à des centrales à gaz ou au charbon qu’il faudra faire appel, car les autres énergies renouvelables (hydraulique, géothermie, biomasse…) ne pourront pas compenser l’abandon de l’éolien ou du solaire. Et même avec de nouvelles installations nucléaires, sans accroissement massif de toutes les énergies renouvelables, nous ne pourrons pas sortir de notre dépendance aux énergies fossiles. Problème : la quasi-totalité des énergies fossiles consommées en France vient de l’étranger. Augmenter notre consommation d’énergie fossile augmenterait donc notre dépendance vis-à-vis de pays étrangers, dont l'essentiel sont extra-européens. Un comble pour un parti qui prône la souveraineté nationale.
Or, comme le rappelle le GIEC, le seul moyen de limiter le réchauffement climatique de la planète à 1.5 degrés est de sortir des énergies fossiles au plus vite, en compensant par une forte augmentation des énergies renouvelables dans les dix prochaines années.
Avec ou sans nucléaire, il faut donc développer les énergies renouvelables, et toutes les énergies renouvelables, le solaire et l’éolien en prime : aucun des scénarios de transition énergétique ne peut se passer d’un net accroissement de la production éolienne et solaire. Le scénario énergétique proposé en 2021 par le gestionnaire du réseau français de transport d’électricité, RTE, estime à minima que la puissance installée par rapport à 2022 doit être multipliée par 4.7 en matière de photovoltaïque, par 2,3 pour les éoliennes terrestres d’ici à 2050 pour satisfaire nos besoins futurs et sortir des énergies fossiles. A minima, l’éolien et le solaire devront représenter 40 % de la production d’électricité en 2050. En se limitant au nucléaire et à l’hydraulique, et même avec un peu de solaire, le programme du RN conduit indéniablement à recourir encore plus aux énergies fossiles. Celles-ci nuisent gravement à la santé humaine et à l’environnement.
Une marginalisation des initiatives citoyennes au détriment du partage de la valeur et des retombées locales
Le RN souhaite re-nationaliser et re-centraliser autour d’EDF les activités de production (nucléaire) et de fourniture. Ce programme a une conséquence directe pour les centaines d’initiatives citoyennes existantes sur les territoires, en particulier les projets de production portés par les citoyen⋅nes. Ces projets citoyens sont très dépendants de l'existence de cadres facilitateurs adéquats et donc des politiques qui peuvent les faciliter (via les dispositifs de soutien public par exemple), ou les freiner voire les faire disparaître (suppression des dispositifs de soutien, des budgets alloués à l’ingénierie territoriale, des subventions aux réseaux outillant les citoyen⋅nes sur les territoires,...).
L’énergie citoyenne a pourtant déjà fait ses preuves : retombées économiques locales 2,5 fois plus importantes que les projets “classiques”, meilleur partage local de la valeur, création de boucles de solidarités locales, lutte contre la précarité énergétique,...
Deux grandes absentes : la sobriété et l’efficacité énergétique
La sobriété est totalement absente des propositions du RN. Le mot n'apparaît pas une seule fois dans le programme du RN aux Européennes. Au contraire, la politique fiscale proposée, baisser la TVA de 20 à 5,5 % sur les carburants, va sans doute favoriser la hausse de consommation des carburants. L’idée que la fiscalité des carburants n’aurait aucun effet sur les choix des consommateurs est en effet une fiction largement documentée. Le signal-prix fonctionne. Une baisse de la TVA sur les carburants pour tout le monde, sans condition de ressources, entraînera très probablement une hausse des volumes consommés.
La sobriété est pourtant un levier essentiel de la transition énergétique. Elle ne peut reposer sur les seuls petits gestes individuels, elle suppose des mesures politiques ambitieuses.
Soeur jumelle de la sobriété, l’efficacité énergétique n’est pas mieux prise en compte dans le programme du RN. La récente annonce du candidat Bardella de lever les interdictions liées au diagnostic de performance énergétique l’illustre parfaitement. Le candidat annonce ainsi vouloir laisser en circulation des milliers de passoires thermiques, énergivores et indignes. Un comble pour un parti qui prétend défendre les plus précaires. Le RN pense-t-il que seuls des étrangers vivent dans un habitat mal isolé ?
En piétinant ainsi les trois piliers de toute politique de transition énergétique un tant soit peu ambitieuse, le programme du RN se montre injuste et climaticide.
Le 30 juin, votons !