Qu'est-ce qu'on attend pour changer de modèle énergétique ?
Selon le récent « scénario de transition énergétique » publié par négaWatt - association composée d’experts et praticiens de l’énergie - la France pourrait passer à 100 % d’énergies renouvelables d’ici à 2050. D’aucuns diraient que ces projections sont « utopiques » … pourtant, ce scénario a été conçu à partir de données sociétales et technologiques les plus récentes et les plus pragmatiques. Il mise sur les évolutions structurelles - individuelles, collectives et industrielles - que pourraient connaître la société d’ici 30 ans. C’est donc à nous de donner une chance au scénario négaWatt, à nous de le rendre viable. Mais comment ?
Une réflexion nécessaire dans tous les secteurs de la consommation
Malgré les nombreuses normes européennes qui tentent de mettre fin à « l’ébriété énergétique », la consommation d’électricité associée aux appareils électriques a été multipliée par 6 depuis les années 1970. La faute sans doute à la multiplication de ces appareils au sein de nos foyers, et à leur mauvais niveau de performance énergétique. Dans le secteur résidentiel et tertiaire, on estime ainsi que 15 % de la consommation actuelle pourrait être économisée, rien qu’en changeant les appareils peu performants, et en en généralisant un usage plus « responsable ».
Le scénario négaWatt mise en effet sur une baisse de 50 % de la consommation d’énergie entre 2015 et 2050 et ceci grâce à l’efficacité des appareils mais également, et surtout, grâce à la sobriété des comportements. En effet, nos besoins en énergie sont intimement liés à notre mode de vie. Une étape clé de la transition vers la « sobriété énergétique » est d’interroger, et de modifier en profondeur nos habitudes : repérer les gaspillages bien sûr, mais également s’émanciper vis-à-vis de certains appareils et faire preuve de bon sens quant à leur utilisation. Intégrer ces quelques gestes au quotidien peut permettre de diminuer drastiquement sa consommation d’énergie, et donc ses factures tout en ayant le même confort chez soi.
Ce sont ces deux facteurs clés - un usage plus sobre d’équipements plus efficaces – qui nous permettront de rentrer dans un cercle vertueux de consommation et de coller aux projections 2050.
La construction d'un nouveau modèle énergétique passera nécessairement par cette prise de conscience collective, et la mise en place de ces mesures de réduction des consommations individuelles. Le but ultime étant de créer une société qui utilise mieux l'énergie, sans réduire la qualité de vie.
A plus grande échelle, cela nécessite également de repenser les modèles et les industries existants. On le sait, le secteur de la mobilité est par exemple très préoccupant : la voiture individuelle est encore utilisée pour 65 % des km parcourus. Ce modèle inefficace doit muter, en passant pourquoi pas par des leviers comme la démocratisation des véhicules hybrides et électriques, les services d’auto-partage etc. Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres : les secteurs résidentiels et industriels sont d’autres exemples de « mauvais élèves » qui doivent mettre en place des process plus sobres pour avancer dans le bon sens. Certains fournisseurs proposent désormais la mise en place d’outils de maîtrise d’énergie, destinée à accompagner les particuliers et les professionnels dans la gestion de leur consommation d'électricité. Enercoop, a par exemple lancé en début d’année une gamme complète de services : une formation personnalisée pour apprendre à éviter les gaspillages énergétiques et décrypter les normes, un accompagnement pratique sous forme de fiches thématiques disponibles sur le web, qui sont destinés aux particuliers et aux professionnels, qu’ils soient clients ou non.
La sobriété et l’efficacité pour une mutation du système vers 100 % d’énergies renouvelables
Cette vision globale s'appuie sur un troisième fondement : sobriété et efficacité énergétique doivent être accompagnées du fort développement des énergies renouvelables. Car on le sait, elles sont la seule alternative économiquement et sociétalement viable à long terme. Et grâce aux efforts de sobriété sur les usages et de performance énergétique sur les équipements, nos besoins pourront être satisfaits en quasi-totalité par le mix des énergies renouvelables : éolien, photovoltaïque, hydraulique, biomasse ... Cela permettra à la France de s’émanciper de son modèle de production actuel, encore basé à 85 % sur des énergies nucléaires et fossiles, qui sont polluantes, dangereuses, et onéreuses. Supprimer totalement le recours aux énergies fossiles permettrait de diviser par 15 les émissions de CO2 et par 2 les émissions de méthane et proto d’azote, engendrant une amélioration sensible de la qualité de l’air, la diminution des risques d’accidents nucléaires et des impacts environnementaux.
Par ailleurs, en termes de retombées socio-économiques, le recours total aux énergies renouvelables permettrait de créer plus de 500 000 emplois d'ici 2050. On estime également que les 10 % de ménages français en situation actuelle de précarité énergétique - c’est-à-dire qui consacrent plus de 10 % de leurs revenus à leurs dépenses d’énergie – serait divisé par 8.
L’application résolue de la démarche de sobriété, d’efficacité et de substitution par les énergies renouvelables rendra sans nul doute la France porteuse d’un message fort de responsabilité et exemplarité. Qu’est-ce qu’on attend ?